Le saxophoniste François Corneloup, que nous avions découvert avec Ursus Minor, revient dans un projet solo, accompagné de musiciens américains et français.
Depuis la fondation du label Nato en 1980, le producteur Jean Rochard publie (et suscite) régulièrement des rencontres musicales associant l’Ancien et le Nouveau monde. La collection Hope Street du label, lancée en 2000 comme un pont au-dessus de l’Atlantique, ainsi que le festival Minnesota-sur-Seine, créé en 2003 aux États-Unis, sont la suite logique autant que l’amplification de ce mouvement. Outre le Minneapolis de Michel Portal, une des rencontres les plus fameuses est celle qui a donné naissance à Ursus Minor, véritable ovni au croisement de la musicalité du jazz, de l’énergie du rock et de l’esprit contestataire du punk et du hip-hop (lire La Griffe nº178). On attend d’ailleurs une nouvelle tournée du groupe cet été.
L’arrêt sur Ursus Minor n’est pas tout à fait innocent, puisque c’est le projet d’un de ses membres qui nous intéresse ici. François Corneloup y développe en effet des lignes de saxophone baryton rageuses et rugueuses, pilier de la rythmique du groupe. Son rôle dans Next, orchestre qu’il dirige et album dont il signe toutes les compositions hormis une reprise de Barbara, est cependant différent. Contrairement à Ursus Minor, Next dispose en effet d’un bassiste, en la personne de Chico Huff. Accompagnateur recherché, d’une grande précision de jeu, ce dernier possède un son rond et chaud qui contraste idéalement avec le baryton de son leader. La section rythmique est complétée par l’étonnant batteur JT Bates, aux interventions imprévisibles, mais jamais malvenues. Partageant le devant de la scène avec Corneloup, deux fortes personnalités : le facétieux et inventif guitariste Dean Magraw, et l’Hendrix français du violon, Dominique Pifarély. Soit trois Américains et deux Français, réunis sous les bons auspices de Jean Rochard.
Les compositions sont riches et variées, alternant des mouvements très rock ou d’ascendance funk avec des plages calmes (mais pas méditatives pour autant). La cohésion du disque se retrouve sur scène — en ce qui nous concerne, ce fut lors du festival Sons d’Hiver en région parisienne au mois de février —, où le plaisir qu’ont ces cinq-là à jouer ensemble est manifeste et ne compte pas pour rien dans le plaisir que prend à son tour le spectateur à en déguster les échanges. On ne regrettera que la monotonie du format des compositions, trop calquées sur le modèle « exposition du thème / solos / reprise du thème / break de fin ». La qualité du groupe laissait augurer plus d’invention sur la forme. Pour la prochaine tournée ?