C’est parti pour la grande fiesta musicale hivernale que sont les Trans Musicales. Trois jours (du 9 au 11 décembre), près d’une centaine de concerts dans dix lieux différents de Rennes et des environs. Pioche subjective non exhaustive.
Elles sont loin les Trans Musicales où quelques artistes connus (Beastie Boys, Fugees…) éclairaient l’affiche pour attirer le chaland dans l’impersonnel Parc Expo. Les deux tiers des concerts se déroulent toujours dans ses halls immenses qui jouxtent l’aéroport, mais il n’est plus obligatoire d’y programmer des têtes d’affiches, la réputation du festival se suffisant à elle-même. Selon les générations, on peut cependant en discerner trois.
Pour les plus anciens, voici Roky Erickson (samedi 11 au Parc Expo), qui n’est pas mort malgré son passé sulfureux de leader du légendaire groupe psychédélique 13th Floor Elevators. L’auteur du hit « You’re gonna miss me » a sorti cette année un album, Out All Evil, qui lorgne vers un rock mainstream à la Springsteen. Les jeunes générations pencheront pour Stromae (jusqu’au 11 au centre culturel L’Aire Libre) et M.I.A. (vendredi 10 au Parc Expo). Le premier, belge d’origine rwandaise, est l’auteur du tube « Alors on danse ». La seconde, londonienne d’origine sri-lankaise, a créé la polémique par un clip violent signé Romain Gavras et a placé un titre sur la BO de Slumdog Millionaire.
Savage rock
Jamais simple d’ouvrir la première des soirées du Parc Expo. La tâche incombe cette fois à The Pack A.D. (jeudi 9, Hall 4). Un duo féminin canadien guitare-chant/batterie qui n’a pas grand-chose à envier (si ce n’est pour l’instant la notoriété) aux White Stripes, Black Keys et autres Kills. Trois albums déjà à son actif : Tintype, plutôt cool, en 2007 ; Funeral Mixtape, franchement blues, en 2008 ; et cette année We Kill Computers, condensé garage-rock incendiaire d’où surgissent de véritables pépites (« Deer », « 1880 », « K-Stomp », « The Slow Down »). Pépites également avec le morceau « Fafafafuckin’ » des Belges Madensuyu (vendredi 10 au Parc Expo) qui envoie un rock bruitiste aux accents vocaux rappelant les Cramps et le Velvet Underground. Ou avec le titre « Bank Holiday » de The Lanskies (samedi 11 au 4 Bis). Des Normands qui croiseraient le fer avec Cure, les Clash et Madness au cœur des années 80.
Variations world
Côté musiques du monde, toutes les latitudes sont explorées. Donso (jeudi 9 au Parc Expo) tend un pont endiablé entre le Mali et la France. Les Suisses Mama Rosin (samedi 11 au Parc Expo) sont tombés dans la marmite bluegrass et cajun. Dengue Fever unit la langue khmer cambodgienne à la surf music américaine (vendredi 10 à la salle de la Cité). La Colombie est deux fois à l’honneur : Systema Solar (vendredi 10 au Parc Expo) concocte un détonant cocktail où l’on croit entendre orgue de barbarie, washboard et voix ragga. Son compatriote Bomba Estereo n’est pas sans convoquer l’esprit Manu Chao, et son morceau « Fuego » ne peut mieux porter son nom (samedi 11 au Parc Expo). A la croisée des genres, le hip hop n’est pas en reste avec deux formations hors des sentiers battus : Oy (vendredi 10 au Parc Expo) menée par la chanteuse d’origine ghanéenne Joy Frempong, et Blitz the Ambassador (samedi 11 au Parc Expo) aux arrangements gorgés de cuivres et de guitares.
Les Trans ne seraient pas les Trans sans quelques groupes Ovni. Gonjasufi croise rythmes planants et voix trafiquée à la Tom Waits (samedi 11 au Parc Expo). Les Finlandais (eh ouais !) Shogun Kutinoki orchestrent une symphonie de claviers vintage complètement barrée (vendredi 10 au Parc Expo). Même jour, même lieu pour le Dj Raph Dumas qui s’est adjoint un groove band 60’s (The Primaveras) et un orchestre traditionnel catalan (Cobla La Millenaria). D’autres versent dans la BO de films imaginaires : The Phenomenal Clap Band (jeudi 9 au Parc Expo), Rio Cinema Orchestra (vendredi 10 à l’Ubu), Güz II (samedi 11 au Liberté).
Et la scène rennaise ?
Après le passage à vide de la fin des années 90/débuts 2000’s, la scène rennaise a retrouvé de l’éclat. Nombre de groupes se bousculent au portillon pour succéder à The Popopopops, Success (Trans 2008) ou The Wankin’ Noodles (2009). Déjà programmé aux Trans 2007, Lady Jane (samedi 11 au Liberté) mérite encore plus le détour tant son blues-rock psychédélique s’est étoffé. La Corda transformera-t-il en écrin la salle de la Cité avec son post-rock ouaté ? Réponse vendredi 10. L’Étage du Liberté est cette année dévolu aux groupes locaux. On ne saurait manquer le post-punk redoutable de Eat Your Toys et le bastringue balkanique de Fuckin’ Hell Orkestar (jeudi 9), la fusion explosive garage-blues-électro de Garbo et la chanson pop en français de AD… (vendredi 10).