Ses disques sont légion (une cinquantaine), ses concerts beaucoup moins. Le génial polyinstrumentiste minimaliste tourne peu. Son unique prestation dans le cadre des Tombées de la Nuit à Rennes (de surcroît en son Opéra) mérite donc le détour.
Incroyable ! Le stakhanoviste catalan n’a pas sorti de disque cette année, lui qui en publie au moins un ou deux depuis ses débuts en 1975. En 2007 sont parus Monofonicorama (florilège des millésimes 2005>1992) puis Mètode de Rocanrol dont la pochette affiche une femme nue coiffée d’une tête de Mickey gonflable posant devant une croix composée à partir de mêmes baudruches. Typique de l’esprit dadaïste de Pascal Comelade qui irrigue sa musique et les noms de ses morceaux. De « Stranger in paradigm » à « Smog on the vermut », de « The indian of the group » à « Le Barman de Satan », de « Mossen xemeneia a l’heliogàbal » à « The Halucinogenic espontex sinfonia », leur lecture induit déjà une odyssée spéciale.
Comelade titille l’imagination comme les Séries B, il n’effraie pas mais intrigue. On se dit qu’il n’est pas loin du Masque de la mort rouge, de La Chevauchée des bannis ou des Trois Visages de la peur et qu’il n’aurait pas fait tache auprès d’Edgar Poe, Roger Corman, André de Toth ou Mario Bava. Il a d’ailleurs œuvré pour de nombreuses musiques de films, et c’est le générique d’une émission aux frontières du réel (Strip Tease) qui lui a valu à ce jour sa plus grande popularité. Accompagné de son fidèle Bel Canto Orquestra, Comelade triture puis ressuscite les musiques populaires traditionnelles à coups de pianos jouet, d’instruments classiques ou en plastique. Le boléro côtoie le blues, le tango le rock, la rumba la fanfare… dans un déluge sonore déstructuré mais toujours respectueux.